"Guérir" c'est se transformer
- sandrarocquet
- 21 oct.
- 5 min de lecture

"On ne peut pas changer le passé, mais on peut changer le poids que ce passé occupe encore dans nos vies".
Lorsque j'ai commencé à m'intéresser aux métiers de l'accompagnement (à 20 ans je souhaitais être psychologue et finalement j'arrive 30 ans plus tard aux métiers du coaching et de la psychothérapie !), je pensais que l'on "guérissait".
Comme d'un rhume, d'une bronchite ou d'une jambe cassée.
C'est en commençant à étudier et expérimenter les choses en profondeur que j'ai réalisé que ce n'était pas vraiment ça.
Mais alors, que se passe-t-il ?
"Comprendre" est une première étape incontournable
Tout le monde a une représentation plus ou moins juste de ce que la psychanalyse propose, à savoir un accompagnement qui s'étale sur un temps long et dont le principe consiste à mettre à jour des éléments refoulés dans l'inconscient et qui posent des problèmes dans le présent. Je ne rentrerai pas ici dans les débats qui entourent la psychanalyse, de nombreux livres et articles le font très bien.
Mais le principe qui consiste à comprendre et à identifier les racines du problème reste valide. Il l'est dans d'autres disciplines comme la sociologie ou l'anthropologie et leur application dans les entreprises comme dans la société en général.
Mettre le doigt sur "ce qui a fait mal", quels que soient l'intensité, le type de problème, l'époque où cela a eu lieu, est la première étape pour aller vers une amélioration de la situation. Pour autant, cela peut prendre beaucoup de temps car le temps psychique n'est pas le temps commun. Et on peut parfois avoir identifié avec précision ce qui a blessé ou marqué, ce n'est pas pour autant que l'on sait changer immédiatement nos manières d'être ou d'appréhender les choses.
Spontanément, certaines approches sont davantage orientées vers les solutions, le "ici et maintenant" et l'avenir. Moins vers l'exploration des causes racines. C'est d'ailleurs sujet à débats sans fin dans le milieu de la psychologie, notamment entre les tenants des thérapies comportementales et cognitives vs les psychanalystes par exemple.
Pour autant, quand on s'intéresse aux premières, on s'aperçoit qu'elles sont loin d'ignorer le passé des patients. Elles ne le décryptent simplement pas avec le même cadre de référence !
Retenons toutefois que quel que soit le changement que l'on souhaite, le mieux-être que l'on veut atteindre, la première partie du travail consiste généralement à comprendre et à regarder le sujet qui nous préoccupe d'un peu plus loin, avec l'aide d'un professionnel (thérapeute ou coach, tout dépend de ce que l'on recherche). Que fait-on aujourd'hui ou que ressent-on, dont les origines remontent à l'enfance ou à l'adolescence ? Avec qui avons-nous vécu ou interagi dont les comportements nous ont marqué ?... Quels chocs ou traumastismes se sont enfouis dans une mémoire parfois capricieuse ?
L'exploration du passé, plutôt du ressort de la thérapie, peut avoir ensuite des degrés de profondeur différents selon les souhaits de la personne ou selon les approches utilisées. Elle peut aussi parfois se faire en plusieurs étapes, le temps d'intégrer et de "laisser maturer" certaines prises de conscience.
"Se mettre en mouvement" crée le vrai début de changement
Je m'en suis rendu compte dans mon propre travail personnel, avoir "compris" ou mis le doigt sur ce qui peut être la ou une des cause(s) des difficultés du présent ne suffit en général pas.
C'est sans doute pour cette raison que j'ai choisi le coaching, avant de réaliser qu'être thérapeute était une vocation que j'avais quelque peu ignorée. Mais quelle que soit l'approche, il me semble depuis longtemps que la "mise en mouvement" est essentielle.
Qu'elle passe par le fait de tenter de faire "autrement que ce qu'on a toujours fait", même avec des actions minuscules au départ, ou par des changements plus radicaux, c'est l'action qui permet de dépasser le facteur bloquant. Ce peut être parfois ne pas envoyer un sms alors qu'on aurait "toujours fait comme ça" et que cela engendre des disputes, ce peut être de se confronter à une peur par petites touches (s'approcher d'une araignée même de loin plutôt que de détourner les yeux)…
Et ce mouvement est aussi lié à ce qui se passe dans notre corps. C'est pour cela que j'ai choisi de me former à des approches psychocorporelles (voir mon autre article qui distingue les différentes formes de thérapies psychocorporelles [https://www.coherentia.fr/post/mon-corps-mon-allié]).
Mettre son corps en mouvement, se reconnecter à lui, (ré)apprendre à l'aimer, à lui faire confiance, prendre le temps de laisser des émotions s'exprimer via des exercices physiques, dansés, etc., autant d'actions qui permettent de se rassurer, de se sentir mieux, de se réconcilier avec soi-même, de se réparer.
Ainsi, après avoir compris, on agit par, avec et pour soi-même. Et donc dans son lien aux autres et au monde.
(Se) "Transformer" pour vivre et être mieux
Les alchimistes pensaient que le plomb pouvait être transformé en or. D'un point de vue symbolique, le plomb c'est nous "avant", c'est cette version de nous-même que nous n'aimons pas vraiment ou plus trop. L'or, c'est ce vers quoi nous voulons tendre, c'est ce que certains appellent cette "meilleure version de nous-même". Je n'adhère pas vraiment à cette expression si répandue parce qu'elle suppose 1) qu'il existe a priori une "meilleure version" prédéfinie (mais laquelle ?!!) et 2) parce qu'elle peut être mal interprétée et trop orientée vers une recherche de performance qui n'est pas du tout le but recherché.
La "transformation" est ce processus parfois long, parfois semé de nombreuses étapes, parfois décourageant parce qu'il ne va pas assez vite, par lequel, on modifie son regard sur soi, sur le monde, sur ce qui nous est arrivé, pour arriver petit à petit à ce que cela ne nous encombre plus, ne nous pèse plus. On ne le fait pas disparaître, on en atténue les couleurs et la brillance, comme une photo qui s'efface sous l'effet du soleil.
Une belle métaphore de ce qu'une thérapie peut apporter : le Kintsugi, cette tradition japonaise qui consiste à réparer les céramiques brisées avec une laque saupoudrée de poudre d’or, d’argent ou de platine, mettant ainsi en valeur les fissures au lieu de les dissimuler.
Transformer, c'est partir d'un matériau, d'une situation de départ, en évaluer toutes les caractéristiques, se demander à quoi on aimerait arriver et mettre en place tous les gestes et actions qui permettant de tendre vers ce but. Celui-ci évoluant aussi au cours du processus.
En me formant au coaching, à la psychologie et la psychothérapie, en pratiquant mon propre travail personnel, j'ai compris que je me fourvoyais lorsque j'avais 20 ans. Si une thérapie "répare", ce n'est pas en permettant un retour à un état antérieur au traumatisme ou aux problèmes rencontrés. Non, une thérapie "répare" en offrant la possibilité de se reconstruire différemment en utilisant la poudre d'or que nous offre la vie et en ayant le courage de se mettre en mouvement vers Soi.



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